Un mot sur les experts et les UAP vu de France
- navigateur88
- il y a 5 jours
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Depuis plusieurs années, des vidéos capturées par des pilotes militaires américains suscitent un vif intérêt, alimentant débats publics et spéculations autour des phénomènes aériens non identifiés (PAN ou OVNI). L’un des cas les plus médiatisés est celui de la vidéo surnommée « Go Fast », publiée en décembre 2017 par le New York Times, aux côtés de deux autres enregistrements similaires. Ces vidéos avaient été tournées par des pilotes de la US Navy lors de deux séries d'incidents : l’un au large de San Diego en 2004, et l’autre entre décembre 2014 et janvier 2015, au large de la Floride.
La vidéo « Go Fast », filmée en janvier 2015, montre un petit point blanc semblant se déplacer à grande vitesse au-dessus de l’océan. L’excitation palpable des pilotes au moment où l’objet est verrouillé par leur radar a contribué à l’impression d’un phénomène inhabituel.
En 2022, le Département de la Défense des États-Unis a créé l’AARO (All-domain Anomaly Resolution Office) afin de mener des enquêtes rigoureuses sur ces événements. L’organisme vient de publier un rapport détaillé de 25 pages consacré à cette vidéo. Selon ses conclusions, l’objet observé ne mesurait que quelques dizaines de centimètres — « de la taille d’un drone ou d’un oiseau », précise le rapport — et sa vitesse réelle, loin d’être fulgurante, était estimée entre 8 km/h et 150 km/h.

La nature exacte de l’objet demeure incertaine. Le rapport évoque l’hypothèse d’un ballon atmosphérique, bien que sa petite taille la rende peu probable. Une autre possibilité serait un ballon récréatif gonflé à l’hélium, comme ceux que l’on trouve lors de fêtes d’enfants. Ce type de ballon peut atteindre des altitudes allant jusqu’à 30 000 pieds avant d’éclater. Dans ce cas, l’objet évoluait à environ 13 000 pieds. Sa faible vitesse, cohérente avec celle du vent, contrastait fortement avec celle de l’avion d’observation, qui volait entre 600 et 700 km/h, ce qui pourrait expliquer l’illusion d’un mouvement rapide.
Je n’irais pas jusqu’à qualifier les pilotes ou les analystes de l’AARO d’incompétents. La lecture du rapport montre qu’il s’agit d’une étude particulièrement pointue, fondée sur une démarche méthodique, des calculs complexes, et de nombreux graphiques. Ce qui est toutefois notable, voire ironique, c’est que Mick West, analyste indépendant bien connu dans le domaine de la vérification d’informations, avait proposé dès 2017 une explication très similaire à celle du rapport officiel. La différence réside dans l’approche : là où West s’appuyait sur une analyse rapide mais cohérente, l’AARO a mené une investigation scientifique complète, formalisée et validée par des données officielles.
Ce n’est pas mon rôle d’évaluer la psychologie des pilotes ; je me concentre sur les faits. Or, les recherches en neurosciences menées ces trente dernières années ont montré qu’un pilote, aussi expérimenté soit-il, peut confondre un ballon d’enfant avec un phénomène inexpliqué. Le biais d’autorité — cette tendance à croire que l’expertise rend infaillible — s’est ici, comme le ballon lui-même, quelque peu dégonflé.
Ce cas illustre avec clarté les limites de la perception humaine dans des conditions dynamiques et complexes, ainsi que l’importance d’une démarche analytique rigoureuse. Il rappelle également que les témoignages, même issus de milieux hautement qualifiés, doivent toujours être examinés à la lumière des faits, sans précipitation ni présomption.
Avi Loeb ou Garry Nolan , des experts contestés

Avi Loeb est un astrophysicien reconnu, professeur à Harvard, dont les travaux sur les trous noirs, les premières étoiles et la cosmologie sont salués dans la communauté scientifique. Pourtant, il est aussi devenu une figure controversée, notamment en raison de ses prises de position audacieuses sur la possibilité d’une intelligence extraterrestre.
La principale controverse remonte à 2017, lorsque Loeb a proposé que 'Oumuamua — un objet interstellaire traversant notre système solaire — pourrait être d’origine artificielle. Alors que la majorité des chercheurs penchent pour une origine naturelle (comme un fragment de comète), Loeb a suggéré qu’il pourrait s’agir d’un artefact technologique extraterrestre. Cette hypothèse, bien que appuyée par certains éléments intrigants, a été largement critiquée pour son caractère spéculatif. Plusieurs scientifiques ont reproché à Loeb de médiatiser des idées non encore validées par le processus scientifique classique, ce qui brouillerait, selon eux, les frontières entre recherche rigoureuse et conjecture.
En 2021, Loeb a lancé le Galileo Project, visant à détecter des preuves matérielles de technologies non humaines dans notre atmosphère ou au-delà. Là encore, les réactions ont été partagées. Si certains saluent cette initiative comme une manière courageuse de poser des questions inhabituelles mais légitimes, d'autres s'inquiètent de voir la recherche scientifique s’orienter vers des hypothèses difficilement testables, risquant d’alimenter les récits sensationnalistes.
Face aux critiques, Loeb revendique une posture d’ouverture d’esprit. Selon lui, la science progresse en questionnant les dogmes, et il défend l’idée que refuser d’explorer certaines pistes par peur du discrédit serait contraire à l’esprit scientifique. Il dénonce par ailleurs un certain conformisme académique qui, selon lui, freinerait l’innovation intellectuelle.
Qu’on partage ou non ses hypothèses, le cas Loeb soulève des questions fondamentales : jusqu’où la science doit-elle aller dans l’exploration de l’inconnu ? Comment équilibrer rigueur méthodologique et curiosité intellectuelle ? Et quel rôle joue la communication scientifique dans ce type de débat ?
En cela, Avi Loeb incarne à la fois un scientifique chevronné et un provocateur intellectuel, dont les idées, bien que controversées, stimulent une réflexion nécessaire sur les limites — et les ambitions — de la recherche contemporaine.

Garry Nolan est un immunologiste et biologiste cellulaire de renom, professeur à la Stanford University et auteur de plus de 300 publications scientifiques. Il a contribué de manière significative au développement de technologies d’analyse cellulaire avancées (CyTOF, MIBI) et est reconnu dans le domaine de l’immunologie et de l’oncologie.
Depuis quelques années, Nolan s’est intéressé aux phénomènes aérospatiaux non identifiés (UAP), en particulier à travers l’analyse de matériaux supposément récupérés lors d’observations d’UAP. Il a aussi examiné les effets biologiques sur des individus ayant rapporté des rencontres avec des UAP.
En 2023, il a cofondé la Sol Foundation, un think tank visant à promouvoir une étude scientifique rigoureuse des UAP et à influencer les politiques publiques à ce sujet.
Les travaux de Nolan sur les UAP sont souvent remis en question par la communauté scientifique. Les principales critiques portent sur :
Le manque de publications scientifiques vérifiées : la plupart des recherches de Nolan sur les UAP n’ont pas été publiées dans des revues scientifiques à comité de lecture, ce qui limite la validation de ses hypothèses.
Des interprétations souvent jugées spéculatives : ses analyses de matériaux exotiques ou de données biologiques restent sujettes à des interrogations sur leur rigueur méthodologique.
Une approche médiatique : Nolan utilise souvent des conférences et des podcasts pour partager ses idées, ce qui le place en dehors des canaux scientifiques traditionnels de publication et de débat.
Certains saluent sa démarche d'exploration ouverte des UAP, estimant qu'il est important d'aborder ce sujet sans préjugés. D’autres, en revanche, estiment que ses théories manquent de preuves solides et qu'elles sont trop influencées par son statut académique, ce qui peut brouiller la frontière entre science rigoureuse et spéculation.
Garry Nolan est un scientifique respecté dans son domaine d'origine, mais ses recherches sur les UAP sont encore largement non validées par les standards scientifiques traditionnels. Bien qu’il suscite un intérêt croissant, ses travaux restent controversés, notamment en raison de leur manque de transparence méthodologique et de publication dans des revues à comité de lecture.
Ufo l'Savoir non ? (avril 2025)
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